par Corinne Viggiano
Nous évoluons dans un monde en pleine mutation. La globalisation économique, les nouvelles technologies, l’extension de la communication via internet et les réseaux sociaux sont en train de transformer profondément les rapports entre les peuples, les individus et les nations et ont changé la donne politique.
Nos démocraties occidentales, héritage des révolutions des siècles passés, basculent dans ce que l’on appelle depuis peu « la post-démocratie ».
En apparence, rien n’est changé, tout fonctionne comme auparavant, nos institutions sont les mêmes, axées sur l’État-nation, le libre exercice du droit de vote, la séparation des pouvoirs, les partis politiques, l’égalité pour tous… mais dans les faits il en est tout autrement.
La sphère des décisions n’appartient plus aux états, de plus en plus soumis aux instances internationales ; l’ancien équilibre entre le pouvoir en place et les partis adverses est rompu par l’instauration d’une nouvelle élite qui fonctionne en vase clos aussi bien au niveau de l’État que des grandes institutions et des multinationales. Dans ces conditions, comme le dit Yves Sintomer : « La démocratie devient un spectacle, avec ses acteurs, ses récits et ses intrigues installés sur le devant de la scène, pendant que l’essentiel se déroule en coulisses »1.
Le fonctionnement de l’Europe incarne tout à fait cette évolution ; c’est à Bruxelles qu’on prend les décisions importantes sans tenir compte de l’avis des peuples, d’où leur mécontentement croissant comme en témoigne la crise du Brexit.
La fragilité du contexte mondial, obscurci par des phénomènes hors de contrôle (flux migratoires et arrivée en masse des réfugiés, terrorisme, xénophobie montante vis-à-vis de la population musulmane, discours sécuritaires et guerres humanitaires), pourrait bien transformer nos démocraties flageolantes en dictatures déguisées.
On se demande avec angoisse comment se sortir d’un tel chaos. L’erreur serait de croire qu’il n’y a aucune solution, parce que les forces destructrices sont trop puissantes ou de penser qu’il suffirait de retourner en arrière et de colmater les brèches pour que tout redevienne comme auparavant.
L’ampleur des difficultés nous indique clairement que nous sommes à la fin d’un cycle historique qui réclame un changement radical de mentalité et de comportement pour faire face aux nouveaux défis qu’engendre notre monde hyper connecté.
Des germes de cette nouvelle mentalité sont déjà à l’œuvre partout dans le monde. La multiplication des associations, ONG, mouvements de contestation… témoigne de la mobilisation accrue des hommes et des citoyens par solidarité avec la souffrance engendrée par notre inconscience et notre ignorance.
Alors que la démocratie représentative se meurt, la démocratie participative augmente en fonction des prises de conscience des citoyens décidés à prendre leur destin en main. C’est ce nouveau comportement impliquant une prise de responsabilité directe par l’individu indépendamment de toute couleur politique qui porte en lui l’espoir d’un monde nouveau. Les facteurs actuels de déstabilisation nous poussent donc dans le sens d’une démocratie plus réelle et authentique, plus directe.
Il ne sert à rien de lutter contre les forces destructrices responsables du bourbier mondial dans lequel nous sommes, il est plus intelligent d’utiliser les forces du changement pour aller un pas plus loin et bâtir, à côté de l’ancienne mentalité, une nouvelle façon d’être et de se comporter qui viendra se substituer aux formes anciennes.
C’est parce que la démocratie est en danger et que l’on risque de perdre jusqu’à notre humanité que l’on redécouvre tout le sens de la liberté et de la responsabilisation individuelle. Ce serait utopique de croire que d’un seul coup tout va aller bien, mais tout aussi irréaliste de croire que nous sommes irrémédiablement condamnés. Pour Yves Sintomer, professeur de sciences politiques à Paris 8 : « Il ne faut pas attendre un grand soir, ni une élection qui changerait tout, mais une série d’avancées menées par des acteurs qui, en coopération ou de manière conflictuelle, dessineront d’autres possibles. Il y aura des crises et des régressions, mais l’avenir n’est pas forcément bloqué »2. De quoi nous exhorter au courage sans sombrer dans le désespoir.
Notes
1 Entretien avec Yves Sintomer, par Michel Abescat, Télérama.fr, publié le 01/07/2016.
2 Ibid.
NDLR : Pour Vivre Libre, la gestion sociale du monde à venir a besoin d’un enracinement spirituel pour évoluer en harmonie avec l’Ordre Universel. La démocratie que le monde attend est la démocratie directe, libre de toute croyance religieuse et de tout parti politique, qui donne le pouvoir au peuple. Elle demande que chaque individu soit éveillé au Soi – l’identité spirituelle commune – afin que l’humanité soit Une, reliée à l’Autorité de la dimension métaphysique de la réalité.